Depuis les années 2000, les conditions de prise en soins des personnes souffrant de troubles psychiques n’a fait que se dégrader.
Attention, la liste est longue :
- réduction des capacités d’accueil (50% des lits ont été fermés ces dernières années),
- suppressions de postes amenant les directions à gérer la pénurie au détriment d’un climat social de plus en plus tendu (recours à l’intérim, contrats à durée déterminée), non remplacements suite à la mise en place des 35h,
- négation de la spécificité de la psychiatrie qui n’est pas une discipline comme une autre (n’en déplaise aux théoriciens de la normalisation et du nivelage par le bas), augmentation des difficultés sociales (chômage, précarité, exclusion, misère sociale),
- médicalisation à outrance avec la chimiothérapie au détriment d’un travail analyse clinique, envahissement des laboratoires pharmaceutiques dans la formation des médecins, pénurie de psychiatres,
- des formations initiales et continues qui ne tiennent plus leurs promesses,
la liste est trop longue pour l’énumérer ici…..
Les effets se mesurent au quotidien :
Et là encore la liste est longue …
- Altération de la qualité des soins,
- Transfert sur le médico-social,
- Augmentation de la charge de travail liée à l’accroissement du turn-over des patients avec un suivi et un accompagnement difficile sur l’extra-hospitalier faute de moyens alloués pour amortir la réduction des lits,
- Listes d’attente dans les CMP,
- Travail dans l’urgence le plus souvent,
- Règne des « bonnes pratiques » et de protocoles censés encadrer les manques organisés en amont. De nombreux articles mentionnent aujourd’hui des conditions de prise en charge déplorable avec l’augmentation du recours à l’isolement et à la contention, alors on ressort la bonne vieille éthique, les recommandations de la HAS…
Faut-il avoir fait l’ENA pour ne rien comprendre aux problèmes concrets posés par toutes les attaques dont notre discipline a fait l’objet ? Les rapports sur la psychiatrie n’ont cessés de se succéder mais jamais les constats ne sont suivis d’effets ; on fait toujours porter la responsabilité sur les acteurs.
Les suicides, le burn-out et la souffrance au travail interpellent les pouvoirs publics !!!
Sans blague !!!
Mais ils en sont responsables, et comme aujourd’hui il faut sans cesse prouver qu’on a essayé (peu importe qu’ils y parviennent, d’ailleurs ils n’imaginent même pas y arriver mais principe de précaution oblige), on nous met à disposition un numéro vert pour le personnel en souffrance, ils ont inventé le QVT (Qualité de Vie au Travail ; la Qualité du Travail dans la Vie nous plairait mieux : les mots ont un sens et mis dans l’autre sens, ça n’a pas le même sens non ?), les RPS (Risques Psycho-Sociaux), après avoir matraqué la médecine du travail, ils veulent ré-injecter des moyens pour le suivi des agents en difficulté (là encore, c’est différent de dire « agent en difficulté » ou « agent en souffrance »). Il est question d’améliorer l’environnement et les conditions de travail, d’accompagner les professionnels au changement et améliorer la détection des risques psycho-sociaux.
Comment penser que ceux qui ont créé les problèmes soient eux-mêmes les inventeurs de solutions ?
Certainement que tout n’est pas affaire de moyens MAIS ENFIN, plus personne n’ose dire que c’est un problème d’organisation. Alors ? Alors c’est bien un problème de moyens humains et de volonté d’une politique publique de santé ambitieuse. Une part non négligeable de nos directeurs s’est même mobilisée le 30 novembre pour témoigner de la dégradation de leurs conditions de travail. Contraints par les mesures d’austérité ils n’en peuvent plus de devoir assumer les nombreux dysfonctionnements des établissements dont ils ont la charge. D’ailleurs de nombreux postes de directeurs adjoints, directeurs des soins ne sont pas pourvus ; là aussi, faut-il y voir un problème d’attractivité et de reconnaissance ?